Absentéisme : le coût caché du mal-être au travail

Posté le 28 mars 2012 | Dernière mise à jour le 13 mars 2020

altAvec le stress, les tensions relationnelles et la surcharge de travail, de plus en plus de salariés multiplient les journées d'absence, gonflant ainsi les chiffres de l'absentéisme. Un signe de mal-être au travail que les entreprises ne savent pas toujours déceler...

Le coût de l'absentéisme du au mal-être au travail ? 3500 euros par salarié et par an. En s'appuyant sur son dispositif de calcul de « l'Indice du Bien-être au Travail » et du « Taux de Mal-être au Travail » qu'il a conçu, Victor Waknine, directeur du cabinet Mozart Consulting, a vite fait de faire les comptes : « cette estimation représente en moyenne 7% de la masse salariale en France, c'est alarmant ! » Dans son œil de mire : les absences injustifiées transitoires et les absences pour maladie ordinaire (AMO), qui en disent long, selon lui, sur les tensions au sein d'une organisation ...

L'enquête Kronos sur l'absenteisme dans le monde, réalisée en 2011, traduit le malaise : en France, 53% des personnes interrogées avouent s'absenter en raison du stress et du besoin d'un jour de repos. Des « tire-au-flanc » ? Absolument pas. « Le micro-absentéisme est symptomatique d'un mal plus profond, de dysfonctionnements au sein d'une entreprise et se développe dans tous les secteurs mais en particulier dans l'industrie et les services, comme par exemple, les centres d'appels", constate le sociologue et consultant Denis Monneuse, auteur du livre « L'absentéisme au travail » (Afnor). Révélateur aussi, le présentéisme, peu pris en compte par les RH. Cette absence de cœur à l'ouvrage représenterait 61% des coûts totaux relatifs à la santé d'une entreprise, selon une étude belge de la psychologue Claudia Put, de l'université de Leuven. Le mal-être au travail génère donc des coûts cachés. Or, ces absences désorganisent l'entreprise, augmentant la charge de travail des collègues. Ce qui accroît le stress et les tensions relationnelles...

La chasse aux absents n'est pas la recette miracle

Les entreprises commencent à regarder de plus près ces indicateurs d'absentéisme, même si ce n'est jamais simple d'en identifier les causes. « La première étape de la prévention est d'admettre que l'absence n'est jamais absente de sens », rappelle Guillaume Pertinant, lauréat du Prix Agir 2011 pour son outil de gestion d'anticipation des risques RH, « ilélhor ». Il préconise de passer au crible tout ce qui peut encourager l'absentéisme : des conditions de travail pénibles, une organisation du travail inadaptée, un management pathogène ou défaillant, un déséquilibre entre la vie familiale et la vie professionnelle... « Plutôt que de se focaliser sur les questionnaires qui visent à cerner le ressenti des salariés, il est préférable de commencer par analyser les chiffres de l'absentéisme figurant au bilan social de l'entreprise », ajoute pour sa part Victor Waknine. Ensuite, viennent les pistes d'action. La plus mauvaise ? La sanction. Ce que pratiquent, à tort, bon nombre d'employeurs : 66% des entreprises ont recours à la contre-visite médicale, selon l'enquête d'Alma consulting group. Une manne pour ces « contrôleurs d'absentéisme » qui se bousculent sur le marché, assurant des « visites surprise » à la maison en 48 heures chrono. L'un des leaders, Securex, a ainsi à son actif 600 000 contrôles médicaux, assurés par un réseau de 2000 médecins. Mais cette solution de facilité comporte des effets pervers : « Elle se concentre sur les symptômes en niant les causes du mal et crée un fossé de défiance entre salariés et employeur, ce qui renforce leur désengagement », met en garde Guillaume Pertinant. Même effet-boomerang avec les incitations financières au présentéisme et les sanctions disciplinaires ! Un exemple ? Celui de l'usine Citroën d'Hordain dont la Direction avait mis en place, en 2007, un système de récompenses pour ses ouvriers les plus assidus (prime, tirage au sort pour gagner une voiture etc.). Bien mal lui en a pris ! La CGT l'a illico assigné en justice pour « discrimination envers les salariés malades ».

Miser sur la prévention primaire

Lutter efficacement contre l'absentéisme suppose de prendre le mal à la racine. Les actions de prévention tertiaire (crèches d'entreprise, services aux salariés...) sont utiles pour améliorer le bien-être au travail, mais insuffisantes. La solution réside dans l'amélioration durable des conditions de travail : réaménagement des postes, promotion du télétravail et des horaires flexibles, développement des formations professionnelles, systématisation des entretiens de retour après une absence... Ainsi, à la cristallerie d'Arques, le management a été formé à la conduite de ces entretiens. « Ce temps d'échange permet de comprendre si l'absence du salarié n'a pas caché des problèmes de conditions de travail », explique Denis Monneuse. Dans un groupe de la grande distribution confronté à un problème chronique d'absentéisme des caissières, la direction a revu toute l'organisation du travail et proposé des plages horaires à la carte, planifiables par un logiciel. Résultat, plus de bien-être, moins d'absences. Dans ce groupe de communication parisien, on travaille actuellement à la mise en place d'un tableau de bord constitué d'une quinzaine d'indicateurs RH. L'objectif : suivre, mois par mois, les chiffres de l'absentéisme, et plus seulement annuellement. Un bon moyen de prendre le pouls de ses salariés...

Source : novethic Marie-José Gava

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