Danseuses, cachez cette grossesse qu'on ne veut pas voir !

Posté le 8 février 2012 | Dernière mise à jour le 13 mars 2020

altL'anecdote est bien connue dans le métier : en 1835, Marie Taglioni, ballerine adulée tombée enceinte, justifia son absence de la scène pendant plusieurs mois par un "mal au genou".

C'était il y a bientôt deux siècles. Aujourd'hui, les danseuses n'ont plus à accuser un "genou" capricieux, même en danse classique, forme exigeante et rigoriste – bien que pour des questions de carrières, les ballerines choisissent plus souvent d'enfanter vers 40 que vers 20 ans.

Un tabou à l'école (et parfois ensuite)...

Les cursus professionnels en danse incluent parfois des cours d'anatomie ou de nutrition. Par contre, la grossesse est un sujet passé sous silence. Pour Louise, 20 ans, élève en danse contemporaine au Conservatoire national de Paris, ce silence est symptomatique :

"C'est tabou : on n'en parle pas du tout. C'est vrai qu'on est très jeunes, mais la question pourrait se poser. Si on n'en parle jamais, c'est qu'il doit y avoir une peur, surtout chez les jeunes danseuses, qu'une grossesse signe l'arrêt de la danse."

Pour Emilie, 27 ans, corps de ballet à l'Opéra de Paris, la perspective d'une grossesse serait comparable à un arrêt forcé, dû par exemple à une blessure.

Tomber enceinte équivaut à une pause dans ton parcours. Ensuite, il y a toute une rééducation physique du périnée et de la voûte abdominale, essentiels en danse. Sortir du circuit, ça veut dire passer à nouveau les auditions, et peut-être ne pas récupérer sa place."

Anastasia, 26 ans, ancienne danseuse acrobatique, s'est reconvertie après son accouchement.

"Les places sont chères, et ça tourne vite à la psychose. Quand j'ai annoncé que j'étais enceinte, les filles de mon équipe sous-entendaient que ça m'offrait une bonne échappatoire aux difficultés du métier : j'avais un “prétexte” pour en sortir. Traduction : j'étais mauvaise danseuse et lâche en plus. Sympa. Autant dire que je suis partie sans regret."

"J'ai fait ma Rachida"

Interrogée sur ses trois grossesses, Katja, 48 ans, ancienne danseuse de modern-jazz devenue professeur, sourit :

"C'est un choix personnel, comme dans toute profession. Peut-être qu'en danse plus qu'ailleurs, tu croises des femmes mûres sans enfant qui ont fait le choix de privilégier leur carrière. Mais la danse, ça ne dure qu'un temps."

Soline, 26 ans, danseuse jazz habituée des plateaux télés et mère d'une petite fille, trouve que son métier permet de vivre plus sereinement la grossesse :

"Le milieu entretient de multiples peurs liées au corps : peur de la blessure, peur de la perte de tes capacités, peur de la prise de poids et de l'arrêt contraint...

Pourtant, pendant la grossesse, la professionnalisation du corps est un avantage : maîtrise de la récupération, conscience de tes limites et écoute de tes sensations. En gros, à quel moment tu peux pousser et à quel moment il faut arrêter."

Soline n'a d'ailleurs arrêté son entraînement que durant deux mois. En cours jusqu'au huitième mois – en évitant les sauts puisque "les ligaments sont fragilisés par la grossesse" – elle était à nouveau embauchée sur un spectacle un mois après son accouchement.

source: tempsreel.nouvelobs.com

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