Expertise : risque grave, identifié et actuel, déjà bien suffisant !

Posté le 20 décembre 2018 | Dernière mise à jour le 5 mai 2020

Expertise : risque grave, identifié et actuel, déjà bien suffisant !

Une expertise pour risque grave est justifiée dès lors que le risque est grave, identifié et actuel. Pas besoin d'exiger un niveau élevé de probabilité de survenance d'atteintes physiques ou mentales des salariés.

Le CHSCT d’une société d’hygiène et de prévention décide de recourir à une expertise pour risque grave en mars 2017. Il désigne le cabinet Secafi.
Le CHSCT met en avant une tentative de suicide de novembre 2015, ainsi qu’une attestation de son secrétaire mentionnant :

  • les plaintes de salariés pour souffrances résultant de leurs conditions de travail ;
  • la démission d’un commercial pour dégradation des conditions de travail ;
  • la rupture conventionnelle d’un salarié pour les mêmes raisons ;
  • un appel à la grève comportant parmi ses 8 motifs l’accroissement de la souffrance au travail.

Le CHSCT produit par ailleurs :

  • le rapport d’évaluation des risques psychosociaux faisant ressortir la situation de mal-être au travail ;
  • le turn-over élevé ;
  • les PV de réunions de CHSCT de juin 2016 et d’un groupe de travail de juillet 2016 sur la situation préoccupante des travailleurs de nuit.

Le président du tribunal de grande instance, saisi par l’employeur pour contester l’expertise, annule cette dernière.
Il retient en effet que le risque grave se définit par un niveau élevé de probabilité de survenance d’atteintes significatives à l’intégrité physique ou mentale des salariés spécifiquement en lien avec l’exercice de leur activité professionnelle. Et pour lui ce niveau n’est pas atteint :

  • l’enquête sur la tentative de suicide n’a pas établi de lien avec les conditions de travail ;
  • la tentative de suicide est trop ancienne pour justifier le recours à l’expertise ;
  • les faits allégués par le secrétaire du CHSCT dans son attestation sont particulièrement limités et imprécis.

La Cour de cassation donne tort au président du tribunal de grande instance. Elle rappelle que le risque grave propre à justifier le recours à une expertise s’entend d’un risque identifié et actuel.
Nul besoin d’y ajouter de condition en exigeant un niveau élevé de probabilité de survenance d’atteintes physiques ou mentales.