La face noire du travail

Posté le 10 janvier 2013 | Dernière mise à jour le 13 mars 2020

chsctLes trois quarts des salariés « ne sont pas satisfaits de la reconnaissance dont ils bénéficient, que ce soit en matière de rémunération, de formation ou de parcours professionnel. » Le constat de Jean-François Amadieu, professeur à l’Université de Paris I, est sévère et détaillé.

Des enquêtes sur la vie privée
Pour trouver la perle rare, les entreprises examinent les profils des candidats sous tous les angles. Facebook, Google et Twitter où l’on expose sa vie privée et professionnelle ont facilité la tâche des recruteurs. Mais leurs investigations ne se limitent pas à la toile. Un recruteur de cadres d’hypermarché demande aux femmes combien gagnent leurs maris et « ne recrute pas une femme dont le mari gagne bien sa vie » car elle devra s’occuper des enfants plus que lui. Dans une entreprise de transports, on demande aux candidats s’ils connaissent le nom du secrétaire général de la CFDT : s’ils le connaissent, ils sont soupçonnés de sympathie pour le syndicalisme… et écartés.
L’enquête dépasse parfois le question-réponse. Un laboratoire pharmaceutique va rencontrer l’entourage du candidat pour s’assurer de ses bonnes mœurs : pourquoi n’a-t-il pas d’enfants avec sa compagne ? Quelles sont ses croyances, ses préférences politiques ? Ikea a été épinglé pour avoir mené des recherches sur ses salariés : consomment-ils des stupéfiants ? Sont-ils de gauche ? Syndiqués ?
ADN et détecteurs de mensonges
La France est encore bien loin des pratiques d’autres pays. La société israélienne Midot propose ses services de tests d’intégrité et de passage au détecteur de mensonges à des entreprises comme Adecco, Manpower, Pepsi ou Avis dans une vingtaine de pays. Aux Etats-Unis, « 43 % des entreprises font passer des tests de dépistage de drogue à leurs candidats », et certains vont jusqu’à « effectuer des tests ADN. »
Graphologie et astrologie
Les pratiques ésotériques ont droit de cité dans les entreprises. En 2007, 70 % des cabinets de recrutement utilisaient la graphologie, selon une enquête menée par leur syndicat professionnel. Un professeur d’HEC écrit des livres qui expliquent les bienfaits du tarot pour trouver la perle rare. Une coach, certifiée HEC, valorise « l’intuition », « stade le plus élevé de l’intelligence », pour recruter. Et André Santini, député-maire centriste d’Issy-les-Moulineaux, explique qu’il n’embauchera jamais un Verseau car les personnes de ce signe « manquent de détermination ».
Le règne des tricheurs
Pour trouver un poste, enjoliver son CV et exagérer ses qualités en entretien sont monnaie courante. Selon le cabinet de recrutement Florian Matione Institut, 75 % des postulants exagèrent leurs responsabilités passées. Une autre entreprise française, Verifdiploma, avance que 26 % des diplômes revendiqués sont des faux. « En entretien, les menteurs s’en sortent très bien. Cela a ensuite des conséquences sur la vie de l’entreprise. Il ne faut pas s’étonner que certains traders engloutissent ensuite des milliards », observe Amadieu.
Des écarts de salaire incompréhensibles
Une fois dans l’entreprise, l’opacité continue. « Les salaires sont injustement fixés : les logiques de compétence et de performance ne prévalent pas toujours », dénonce le chercheur. Le réseau est ainsi essentiel. Plus on a de connaissances bien placées dans l’entreprise et en dehors, mieux on est payé. L’origine sociale du salarié pèse également sur son salaire et l’évolution de sa carrière. Plus surprenant, le physique est aussi une variable non dite. Des études ont montré qu’en « France, en Grande-Bretagne ou en Espagne, les hommes grands ont des salaires plus élevés que les hommes de petite taille. » De même, les personnes obèses sont pénalisées dans leur parcours professionnel, selon Jean-François Amadieu. Une grande partie des différences de salaires au sein d’une structure échappe ainsi à la rationalité. Selon le prix Nobel Kenneth Arrow : 50 % des écarts de salaire aux Etats-Unis restent inexpliqués.

Source (republicain-lorrain.fr)

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