Depuis plusieurs mois, l'exécutif monte au créneau pour déminer les dossiers industriels. Mais certaines entreprises pourraient avoir reporté leurs plans sociaux après la présidentielle. L'inquiétude est forte dans l'automobile.
Le deuxième tour de la présidentielle sera-t-il suivi d'un troisième tour douloureux socialement ? Dans un contexte de croissance atone, certains salariés le redoutent, à l'instar de Jean-Pierre Mercier, délégué de la CGT chez PSA, pour qui « la direction de Peugeot attend les élections présidentielle et législatives pour annoncer officiellement la fermeture de l'usine » d'Aulnay-sous-Bois.
Jusqu'ici, l'exécutif s'active pour éteindre les incendies. Le chef de l'Etat a reçu samedi le président du directoire de PSA, Philippe Varin, après avoir dit vouloir « tout faire » pour sauver le site d'Aulnay. Sernam, Photowatt, Lejaby ou encore la Fonderie du Poitou : l'exécutif démine les dossiers à hauts risques en pleine présidentielle. Selon la Dares, 135 plans de sauvegarde de l'emploi (PSE) ont été notifiés en janvier et février. Un niveau bas et inférieur de 18 % à celui de 2011.
« Coups de fil du ministère »
Ce résultat peut surprendre au vu de la conjoncture et de la poussée du chômage. Il s'explique notamment par le recours croissant à d'autres dispositifs (plans de départs volontaires, ruptures conventionnelles, baisse des effectifs intérimaires...). Mais, dès février, le leader de la CFDT, François Chérèque, a accusé le gouvernement de faire pression sur les entreprises pour reporter leurs plans sociaux après mai. « Chose assez habituelle en période électorale, les coups de fil du ministère du Travail ont été particulièrement nombreux cette année, estime aussi Xavier Lacoste, directeur général de la société de conseil en ressources humaines Alixio. A cela s'ajoute, un phénomène d'auto-censure des dirigeants, qui savent que le moment n'est pas le bon pour ce type d'annonces. »
Le ministère du Travail dément de telles pressions et indique que venir en aide aux entreprises en difficulté est un rôle assumé qui ne date pas de la campagne. Il n'empêche, la menace de restructurations est prise au sérieux par l'entourage de François Hollande. « Un certain nombre d'entreprises ont interrompu leurs processus d'ajustement ou gelé leurs annonces, mais le phénomène est difficilement quantifiable », indique Alain Vidalies, chargé de l'emploi dans l'équipe du candidat socialiste.
Pour Thierry Millon, responsable des études chez Altares, si les plans sociaux devaient s'envoler, « ils porteraient probablement sur des grands groupes exposés à la concurrence internationale ». Car « les PME sont pragmatiques et ne confient pas l'arbitrage de leurs décisions à un rendez-vous politique », estime-t-il. « Les remontées des entreprises adhérentes, à ce stade, ne laissent pas apparaître une augmentation des suppressions d'emplois liée à la période postélectorale mais plutôt la poursuite d'un ajustement des effectifs dans la durée pour faire face aux pertes de productivité intervenues pendant la crise », estime aussi Jean-François Pilliard, délégué général de l'UIMM. En 2007, il n'y avait pas eu d'envolée des plans sociaux après les élections. Mais la conjoncture était plus dynamique.
Dossiers en suspens
Reste que les PME pourraient être touchées si leurs grands donneurs d'ordre réduisaient la voilure. « Il suffit de quelques grosses restructurations pour avoir des effets importants sur les sous-traitants, souligne Xavier Lacoste. Les prochains mois s'annoncent extrêmement tendus dans l'automobile et des restructurations sont aussi à craindre dans le raffinage, la téléphonie ou les secteurs du transport et de la logistique. » Au premier trimestre, PSA et Renault ont particulièrement souffert du recul du marché européen. Dans les télécoms, Jean-Claude Mailly (FO) s'est inquiété dans un courrier au régulateur (l'Arcep) des conséquences de l'arrivée de Free Mobile sur l'emploi du secteur. Certains dossiers sont en suspens, comme celui de la raffinerie Petroplus de Petit-Couronne ou de l'aciérie ArcelorMittal de Florange. Quant à l'avenir de la SNCM, il s'annonce comme un dossier brûlant de la rentrée, la direction ayant évoqué l'hypothèse d'un plan social pouvant concerner environ 800 personnes.
Sources ; les Echos FRÉDÉRIC SCHAEFFER
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