L’entretien annuel d'évaluation : quelles sont les règles à connaître avant sa mise en place ?

Posté le 20 novembre 2012 | Dernière mise à jour le 13 mars 2020

chsctL'entretien annuel d'évaluation est un rendez-vous souvent incontournable de la fin d’année entre le manager et ses collaborateurs. L’occasion d'évaluer les compétences professionnelles du salarié, d’identifier ses points forts et ceux à améliorer, de fixer des objectifs pour l’année à venir. Attention, le Code du travail et les juges encadrent sa mise en place...

L'entretien d'évaluation, droit ou obligation pour l'employeur ?

Le Code du travail ne contient aucune disposition obligeant l'employeur à instaurer des entretiens d’évaluation dans son entreprise. Les juges reconnaissent toutefois à l'employeur le droit de pratiquer de telles évaluations, considérant que c’est un droit qui relève de son pouvoir de direction.

L’employeur peut toutefois être dans l’obligation d’organiser de tels entretiens en application d’une convention ou d’un accord collectif. Certains accords peuvent en effet définir des règles relatives à l'organisation ou au formalisme de l'entretien annuel d'évaluation. Il convient donc au préalable de s’y reporter.

Quelles formalités respecter avant de mettre en place des entretiens d’évaluation ?

La consultation des instances représentatives du personnel

Parce que les évaluations sont de nature à engendrer une pression psychologique entraînant des répercussions sur les conditions de travail des salariés, agir sur leur évolution de carrière et leur rémunération, l’employeur doit consulter le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) avant leur mise en place.

Le défaut de consultation du CHSCT expose l'entreprise à se voir interdire la mise en œuvre de la procédure d'évaluation par le juge des référés.

L'avis du CHSCT doit ensuite être transmis au comité d'entreprise (CE) (ou, à défaut, aux délégués du personnel), qui doit lui-même être informé et consulté préalablement à la décision de mise en œuvre dans l'entreprise de moyens ou techniques permettant un contrôle de l'activité des salariés.

Le CE doit en effet être informé et consulté sur toute mesure ayant une incidence en terme de conditions de travail, d'évolution de carrière et de salaires (Code du travail, art. L. 2323-27). Il doit aussi être consulté au titre de l'article L. 2323-32 du Code du travail (consultation préalable à la décision de mise en œuvre dans l'entreprise de moyens permettant un contrôle de l'activité des salariés).

Enfin, les délégués du personnel peuvent recourir à leur droit d'alerte s'ils estiment que les procédés d'évaluation portent atteinte aux libertés individuelles dans l'entreprise (Code du travail, art. L. 2313-2).

Quelles règles appliquer pour que le dispositif d'évaluation soit licite ?

Les méthodes et techniques d'évaluation des salariés doivent être pertinentes au regard de la finalité poursuivie.

Si le dispositif doit permettre d’évaluer la qualité du travail accompli par le salarié, il doit l’être sur la base de critères objectifs et vérifiables et connus du salarié.

Aussi, des méthodes telles que l’astrologie ou la numérologie doivent être écartées.

Ces méthodes ne doivent porter que sur les qualités professionnelles du salarié et non sur sa vie privée. L'employeur ne doit pas prendre en compte des critères tels que l'âge, la santé, l'origine, l'appartenance syndicale, sous peine d'être condamné pour discrimination, ni pratiquer de harcèlement moral.

Elles doivent aussi respecter la dignité des personnes et s'effectuer dans le respect du principe de loyauté.

Enfin, les résultats de cette évaluation doivent rester confidentiels. L'employeur a interdiction de communiquer à des tiers des renseignements concernant le salarié et recueillis au cours des procédures d'évaluation. Mais cette confidentialité n'est opposable qu'aux tiers. Les salariés concernés peuvent demander à accéder aux résultats de leur évaluation.

Quels sont les droits et obligations du salarié lors de l'entretien d’évaluation ?

En raison du caractère impératif de l’entretien annuel d’évaluation, le salarié ne peut pas, sauf abus de droit de l'employeur, refuser de s’y soumettre. Son refus peut être sanctionné par l'employeur. Il peut même justifier un licenciement pour faute grave.

Dès lors que les informations demandées par l’employeur au salarié ont un lien direct et nécessaire avec l'évaluation de ses aptitudes, le salarié est tenu de répondre de bonne foi aux questions posées par l'employeur.

A la différence d’un entretien préalable à une sanction disciplinaire, Le salarié ne peut pas exiger d’être assisté par un représentant du personnel lors de son entretien d'évaluation.

L'employeur est également tenu à une obligation de loyauté. Les informations qu'il demande au salarié doivent avoir un lien direct et nécessaire avec l'évaluation des aptitudes de celui-ci.

Comment formaliser l'entretien d'évaluation ? Comment utiliser les résultats de l'évaluation dans la gestion RH ?

En règle générale, l’employeur remet au salarié un compte-rendu de l’entretien qu’il lui demande de signer. Le refus du salarié de signer le bilan de l'entretien en signe de désaccord avec son contenu n'a aucune d'incidence sur la validité de l'entretien qui s'est déroulé. Toutefois, cela amoindrit la portée du compte-rendu, qui perdra de sa force devant les tribunaux, les deux parties n'étant pas d'accord sur le bilan de l'année écoulée.

Le salarié peut aussi le signer tout en faisant part, dans la partie prévue à cet effet, de ses commentaires sur les critiques faites à son encontre. Il peut ainsi préciser qu'il n'a pas eu les moyens nécessaires à ses missions.

Le salarié peut demander copie du document comportant des données d'évaluation, ainsi que la signification des codes et valeurs qui lui sont appliqués.

Pour la CNIL, « les salariés ont le droit de connaître leur classement annuel et leur potentiel, dans la mesure où ces éléments ont été pris en compte pour décider une augmentation de salaire, une promotion ou une affectation ».

Mais attention, une fois que l’entretien s’est déroulé et que l’employeur a rédigé un compte-rendu sur cette base, il ne peut plus modifier le document à l'issue de l'entretien au désavantage du salarié. Les juges ont vu un indice de harcèlement moral dans le cas où un responsable hiérarchique a modifié le compte-rendu de l'entretien annuel d'évaluation après la tenue de cet entretien et alors que le salarié avait refusé de le signer.

L'entretien d'évaluation permet d’apprécier les qualités professionnelles d’un salarié au moment où il est réalisé. Aussi peut-il avoir des incidences en matière de rémunération, de déroulement de carrière et de formation.

Une appréciation négative du travail du salarié peut constituer un élément à charge que l'employeur peut utiliser contre lui.

L’employeur peut se fonder sur les résultats d'une procédure d'évaluation pour justifier une différence de classification et de rémunération.

Si l'appréciation du travail du salarié est positive, le salarié pourra aussi opposer les comptes-rendus de ses entretiens annuels à l'employeur pour réclamer par exemple une revalorisation de salaire ou contester le motif de son licenciement dans le cas où une incompétence professionnelle lui serait reprochée.

Source (editions-tissot.com)

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