Irritabilité, fatigue, anxiété, déprime, perte d’appétit… Il n’y a pas que les écoliers qui angoissent à l’idée de retourner à l’école. Les grands aussi vivent parfois très mal la reprise du travail.
«A chaque retour de vacances, j’ai le même rituel: je fixe officiellement les prochaines… Ça me fait du bien.» Pour Jeanne, comme pour beaucoup de gens, reprendre le travail après la pause estivale constitue une petite épreuve à surmonter. Et chacun développe des parades pour atténuer la brutalité de l’atterrissage. Mais pour certains, la fin de la période bénie des grasses matinées et des bains de soleil ne sera pas sans conséquences.
Déprime, fatigue, perte d’appétit, difficulté à se concentrer, somnolence, insomnie, déprime, irritabilité, anxiété, rythme cardiaque accéléré, douleurs musculaires… Voilà ce qui attend une partie des joyeux estivants rattrapés par leurs obligations professionnelles. Près de 35% des actifs entre 25 et 40 ans seraient ainsi frappés par le «syndrome post-vacances», identifié par des chercheurs espagnols de l’Université de Grenade sous la houlette de Humbelina Robles Ortega. «Habituellement, il s’agit de l’expression physique d’un inconfort psychique», résume la psychologue.
Le changement de rythme peut être stressant
Pour Yves François, cofondateur de la société de conseil Axess-Lab, spécialisée dans les changements de comportements, on entre là dans un domaine relativement complexe. «Les vacances procurent à la fois du bien-être et des problèmes, à la fois rien de plus et rien de moins que lorsqu’on travaille, explique-t-il. Une étude récente a montré que 60% des gens tirent un bénéfice de leurs vacances, 20% n’observent pas de changement et, pour 20% restant, l’effet serait négatif…» Le retour au travail n’est donc pas forcément une corvée pour tout le monde. «Par contre, un changement de rythme peut constituer une source de stress. Il n’est pas nécessaire d’avoir traversé plusieurs fuseaux horaires, le simple fait de se coucher plus tôt et de se réveiller plus tôt décale et peut suffire. Et se réajuster va prendre entre quatre et six jours.»
Pour beaucoup, les vacances d’été sont les plus longues de l’année. Pour partir loin ou passer du temps avec ses enfants, la plupart des salariés prennent deux, trois, voire quatre semaines d’affilée. «Le risque, au retour, c’est de réaliser que la perspective des prochains congés est très éloignée», relève Elodie Baerlocher, cofondatrice de Salted-Mind, une société romande qui conseille les entreprises soucieuses de valoriser leur capital humain.
Psychologue et spécialiste dans la gestion du stress, Rolf Stauffer estime que l’état d’esprit au moment de reprendre le travail dépend de deux critères essentiels. «Premièrement, la situation – bonne ou mauvaise – au travail et deuxièmement, votre situation personnelle. Certaines personnes sont plus sensibles que d’autres. Celles-là risquent de moins bien vivre leur retour au travail.» Pour Elodie Baerlocher, les personnes qui risquent le plus de souffrir de syndrome post-vacances sont celles «qui se trouvent dans des situations potentiellement conflictuelles, qui ressentent une certaine frustration par rapport à leur travail, ou alors qui subissent une énorme pression sur leurs résultats».
Anticipation néfaste
Manque de chance, le monde professionnel est de plus en plus exigeant. «On attend de plus en plus des employés et, bien sûr, la fin des vacances marque souvent le retour à un environnement stressant», reconnaît Rolf Stauffer. Le pire, c’est que nombre de salariés ont une fâcheuse tendance à anticiper. «Si, quelques jours avant de reprendre le travail, on se dit déjà que ça va être l’horreur, parce qu’on a quinze dossiers en souffrance et 400 e-mails dans sa boîte aux lettres électronique, c’est sûr que ça l’effet sera néfaste», avance Yves François. «On peut faire une analogie avec le syndrome du dimanche soir, ajoute Elodie Baerlocher. On sait qu’à ce moment-là, environ 50% des gens ne se sentent pas bien, dorment mal, etc. C’est en partie lié aux obligations auxquelles elles doivent faire face professionnellement.» Dans ce contexte, explique-t-elle, l’employeur peut jouer un rôle afin d’éviter que les gens qui reviennent après trois semaines de vacances n’aient pas plus à faire qu’avant de partir: «On peut envisager un back-up, soit un remplacement partiel, mais sans que ça constitue un surplus de travail pour quelqu’un d’autre. Certaines entreprises le font et engagent des étudiants, par exemple. Ça a un coût, mais c’est un investissement à long terme, comme tout ce qui valorise le capital humain.» Au final, le but étant d’améliorer les performances des employés. Et, pourquoi pas, de les voir revenir de vacances avec un large sourire.
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