RPS : Qu'est-ce que la prévention primaire, secondaire et tertiaire ?

Posté le 26 février 2014 | Dernière mise à jour le 22 juin 2021

prévention secondaire

 

On distingue 3 niveaux de prévention pour les risques psychosociaux. La prévention primaire tente d’agir sur les causes des risques. La prévention secondaire, axée sur le processus dans la situation de travail, vise à améliorer les stratégies d’adaptation de l’individu dans l’organisation. Et enfin la prévention tertiaire, qui porte à tort le nom de prévention puisqu’elle consiste en une action de réparation : elle prend en charge les individus fragilisés, victimes des risques psychosociaux ; Ce sont les programmes de prévention secondaire et tertiaire qui dominent alors que c’est la prévention primaire qui est la plus efficace pour prévenir durablement les risques psychosociaux.

Travailler c’est mettre en œuvre 3 dimensions majeures dans un système complexe

Trois dimensions sont mises en œuvre dans le travail :

  • la composante physique (elle se voit) : gestes, postures, transport, manutentions, manipulations, etc
  • la composante cognitive (elle ne se voit pas) : prise d’informations, traitement d’informations, prise de décisions,
  • la composante psychosociale (elle ne se voit pas) : affective, relationnelle, intérêt, épanouissement personnel.

Ce sont souvent les composantes psychosociales et les composantes cognitives qui sont en cause dans les risques psychosociaux.

La santé au travail vise à préserver l’intégrité physique de chacun, mais également que chacun soit bien dans sa tête, dans son corps et dans ses relations avec les autres.

 

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1- Prévention primaire : logique de prévention

Le modèle de la prévention des RPS a surtout été défini par les sciences de l’épidémiologie, en prévention primaire.

En prévention primaire, on cherche a repérer un facteur de risque pour l’éliminer, le supprimer. Ce risque se situe dans l’organisation.

La prévention primaire se situe au niveau collectif, elle a pour objectif d’agir sur les causes socio-organisationnelles du mal-être (enrichir les tâches, réorganiser l’activité, mobiliser les collectifs, faire évoluer le management, améliorer les conditions de travail), de supprimer des agents psychosociaux pathogènes.

La prévention primaire consiste à anticiper les problèmes et à développer une culture de prévention. C’est une démarche de compréhension et d’anticipation des difficultés avérées ou probables.

La prévention primaire vise à :

  • réduire ou éliminer la présence d’agents psychosociaux pathogènes en milieu de travail,
  • promouvoir un environnement professionnel favorable et capable de procurer un certain soutien.

La prévention primaire repose sur la construction de stratégies collectives qui visent à modifier l’organisation du travail. Elle a des effets positifs sur la santé et sur la performance de l’organisation à plus long terme. Elle est considérée comme la plus efficace mais c’est la moins utilisée.

L’objectif que vise la prévention primaire est à la fois la clef de la réussite et le frein de son utilisation.

En prévention primaire, il faut disposer de méthode et d‘outils : certaines entreprises n’ont que des outils mais pas de méthodes, elles font des observatoires mais n’ont pas donné de sens à cette démarche.

Tous les acteurs de l’entreprise doivent être impliqués : acteurs du CSSCT, direction, médecin du travail.

Il faut amorcer un processus et travailler sur les causes des risques psychosociaux. De nombreux outils peuvent être utilisés, par exemple des entretiens pour que les individus parlent de leur travail, de leur santé. A partir des éléments recueillis , il faut réfléchir à ce que l’on peut proposer pour soulager.

 

2- Prévention secondaire : logique de remédiation, de renforcement

La prévention secondaire met l’accent, non plus sur l’organisation mais sur l’individu. Elle a pour objectifs d’aider les salariés à gérer les exigences du travail plus efficacement en améliorant leurs stratégies d’adaptation aux stresseurs ou en soulageant les symptômes du stress .

Cette prévention secondaire correspond à la gestion individuelle et collective des exigences du travail et à l’amélioration des stratégies d’adaptation individu-organisation. On outille l’individu pour lui apprendre à faire face aux risques psychosociaux : techniques de gestion du stress, relaxation, formation au management, baromètre du stress, team building, coaching, diffusion de bonnes pratiques, sensibilisation/information auprès des différents acteurs.

La prévention secondaire consiste à identifier les problèmes récurrents et à rechercher une amélioration spécifique vers une population salariée identifiée et exposée (une équipe de travail, un métier). Elle tend vers un renforcement des ressources individuelles pour mieux faire face dans l’activité. Elle comporte donc beaucoup d’action de formations, telle que la gestion de l’incivilité des usagers (travail des techniques de communications), d’analyse des pratiques professionnelles (les collaborateurs se retrouvent en équipe pour évoquer une problématique et trouver des pistes d’amélioration).

La prévention secondaire prend souvent la forme de formations, sensibilisations, d’actions ponctuelles vers une équipe de travail. Elle a pour objectifs le développement des ressources pour faire face à la situation et/ou le dépassement de la crise.

La prévention secondaire peut être efficace à court et moyen terme. Elle permet souvent d’aller vers une démarche plus globale.

 

3- Prévention tertiaire : logique de réparation

La prévention tertiaire n’est plus de la prévention mais de la réparation. C’est la plus utilisée pour la prévention des risques psychosociaux mais c’est la moins efficace dans la durée.

La prévention tertiaire est axée sur les conséquences, elle prend en charge les salariés fragilisés, avec la mise en place de soutien psychologique, de mesures de protection. On tente d’obtenir une diminution des manifestations du stress pour favoriser le retour au travail. Il s’agit d’un accompagnement qui peut revêtir diverses formes de soutien pour un individu fragilisé par sa situation de travail. Cette prévention est axée sur la personne, sa souffrance.

Une bonne prévention est une prévention articulée : elle doit pouvoir prendre en charge l’urgence mais également interroger le travail.

Il existe de nombreux freins à l’utilisation d’une prévention primaire alors que c’est elle qui est la plus efficace dans la durée. En effet, la prévention primaire implique de nous questionner sur notre manière de travailler mais bien souvent nous ne sommes pas prêts à remettre en cause et changer notre organisation du travail. Elle implique un engagement de la direction de l’entreprise dans la durée.

La prévention primaire a été très étudiée récemment, on dispose donc de beaucoup de littérature, mais il y a très peu d’évidence scientifique. La mise en place d’une prévention primaire aurait des effets sur la santé et la performance de l’organisation, mais il est toujours difficile d’évaluer les effets d’une prévention primaire. L’INRS et ANACT vont publier une brochure prochainement qui proposera une évaluation de la prévention primaire.

Actuellement, on tend à proposer principalement des solutions de réparation et non de prévention…
On tend à individualiser la souffrance au travail en mettant en place du soutien psychologique, alors qu’il faudrait chercher à l'expliquer par les difficultés professionnelles : il y a une psychologisation excessive des problèmes du travail, facilitée par le goût des entreprises pour les théories cognitives du stress, comme l’explique Philippe Davezies. On tend à rejeter la faute sur les individus, on prétend qu’ils sont désadaptés et on les oriente vers leur capacité à gérer le stress (cette démarche peut néanmoins conduire à regagner en autonomie et réduire les contraintes). L’activité de travail doit être remise au centre de la discussion.

Pour Yves Clot , il faut instituer le conflit sur la qualité du travail dans les entreprises. Le respect du « travail bien fait » est la meilleure prévention contre les risques psychosociaux : Il faut sortir d’une approche en termes de « risques psychosociaux , pour adopter celle des « ressources psychosociales ». En effet, chercher les ressources plutôt que de s’arrêter sur les risques permet d’identifier les conditions nécessaires à la « bonne réalisation » du travail.

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